Présentation - Quelle place pour les émotions en travail social ?
"De nombreux chercheurs et chercheures s’accordent pour dire que les émotions ont été emportées dans les coulisses du raisonnement, les rationalités étant jugées plus précieuses pour construire les savoirs dignes de la science (Gilligan, 1982; Jaggar, 1989; Tronto, 1993). Du côté du travail social, il semble également que cette pensée rationnelle, au détriment de la pensée émotionnelle, ait pris le pas. Rappelons que le travail social est une discipline et une profession où les émotions ont un rôle à jouer. Basé sur la compassion (Hughes, 2017) tout en étant un métier relationnel (Ingram et Smith, 2018), le travail social s’engage à lutter contre les injustices sociales dans le but de produire des changements sociaux et d’améliorer le bien-être des personnes (Fédération internationale des travailleurs sociaux, 2014). Par ailleurs, dans leur pratique, les travailleuses et travailleurs sociaux mettent à profit leurs savoirs, savoir-être et savoir-faire, qui sont construits, en partie, par des processus affectifs. À cet effet, Cook (2017) nous fait part du rôle non négligeable de l’intuition et des émotions des travailleuses et travailleurs sociaux lors d’une première visite à domicile lorsqu’il s’agit de poser les bonnes questions, d’emprunter la bonne voie, avant de faire un compte rendu rationnel et factuel. Pour sa part, Ruch (2005; 2012) nous invite à non seulement reconceptualiser les personnes avec qui nous travaillons, mais aussi à nous reconceptualiser nous-mêmes en tant qu’êtres émotionnels détenant des savoirs expérientiels imbibés de situations complexes et imprévisibles (...) " - Lire la suite
Affect et Témoigner pour Agir. Penser l’action sociale du témoignage public dans sa forme artistique
"Cet article donne suite à une étude de la réception de l’exposition d’art militant Témoigner pour Agir (2017-2018). Pour mieux comprendre l’action sociale et subversive du témoignage public dans sa forme artistique, les points de vue des personnes ayant visité l’exposition sont mis en dialogue avec celui d’une analyse conceptuelle exploratoire de trois des oeuvres présentées. L’analyse s’appuie sur les théorisations de l’affect chez la philosophe féministe Sara Ahmed, une conception sociopolitique des émotions permettant de penser leur rôle non seulement dans la consolidation des normes et des inégalités sociales, mais aussi dans leur transformation. Visibiliser, choquer et montrer la voie de l’inclusion et de la reconnaissance apparaissent comme des actions sociales ayant le potentiel de rejoindre les publics autrement, soit à contre-courant. Enfin, l’analyse de l’intervention par le témoignage artistique contribue à la réflexion plus large du rôle des émotions dans le champ du travail social." - Lire la suite
Ce que font faire (ou ne pas faire) les émotions chez les intervenantes : le cas du soutien à domicile
"Cet article propose d’éclairer la part émotive de la pratique du travail social dans le domaine du soutien à domicile (SAD). Comme point de départ, nous suggérons une incursion, sous la forme de portraits, dans le travail quotidien de deux intervenantes sociales qui oeuvrent respectivement dans un programme de SAD du milieu institutionnel et un regroupement d’organismes communautaires. L’article met en exergue les émotions vécues par les intervenantes, leur portée sur leur vie professionnelle, mais aussi personnelle, ainsi que les stratégies d’intervention qui seront – ou ne seront pas – déployées auprès des personnes usagères et des groupes représentés. Si un engagement émotionnel se dessine, tant dans l’intervention individuelle que collective, celui-ci s’accompagne également d’une fatigue de compassion et d’un manque de reconnaissance du travail accompli. Dans ce contexte, l’article souligne l’importance des collectifs de travail ainsi que du soutien des institutions concernées." - Lire la suite
La prise en compte des émotions en contexte de collaboration interprofessionnelle : perception de professionnels en travail social
"Dans cet article, nous présentons des résultats d’une recherche portant sur l’expérience de collaboration interprofessionnelle (IP) de travailleurs sociaux (TS) au Nouveau-Brunswick (N.-B.). Cette recherche qualitative se situe dans un paradigme interprétatif-compréhensif et cherche à saisir, entre autres, la prise en compte des émotions lors de la collaboration IP. Les participantes sont des travailleuses sociales (n=21) oeuvrant dans plusieurs milieux de pratique. La collecte des données a été réalisée par le biais d’entrevues semi-dirigées et de notes de terrain. Les résultats présentés portent sur des thèmes émergeant de cette étude, soit les émotions ressenties par les TS en contexte d’intervention collaborative (liées aux situations de personnes accompagnées, au processus d’intervention et à l’expérience collaborative), ainsi que sur des stratégies mises en place pour gérer ces émotions. En conclusion, nous présentons quelques pistes de réflexion portant notamment sur la prise en compte des émotions en intervention collaborative et la formation de futurs professionnels à la collaboration IP." - Lire la suite
Exploring emotion work from the narratives of fathers of children with a neurodisability
"Although parenting a child with a neurodisability (i.e., autism, cerebral palsy, or epilepsy) can be a life-altering experience, fathers have been generally underrepresented in research on parenting and their unique experiences underexplored. The aim of this study was to explore feelings, emotions and their management through a secondary analysis of data from an Interpretive Phenomenological Analysis study involving eleven Canadian fathers. The two main themes were as follows: a dance of emotions in the father-child connection and spaces for emotional expression and support. Drawing on Hochschild’s theory of emotion work and theories of masculinity, the complexity and contradictions of this parenting experience are revealed. We suggest that attending to the emotional work of fathers may help social workers connect with and support them." - Lire la suite
Récit - Des postures affectées dans la recherche et l’intervention auprès des personnes faisant l’objet de racisme : quelques réflexions sur l’engagement et le fait d’être concerné.e personnellement
"Cet article propose quelques réflexions sur le fait de s’investir dans la recherche ou l’intervention en lien avec des problématiques qui nous concernent et d’en être affecté.e.s. Le terme anglophone pour désigner cette réalité serait insider. Nos expériences personnelles, en tant que chercheur.e.s et intervenant.e.s dans le domaine du travail social issu.e.s de l’immigration, s’inscrivent également dans les problématiques que nous traitons concernant des populations vulnérabilisées, notamment les personnes descendantes de migrants racisées, les enfants de couples mixtes racisés et les personnes LGBTQ migrantes et racisées. Nous aborderons ainsi, à travers nos objets d’engagement respectifs, comment le fait de travailler avec des populations racisées vient réactualiser des formes d’exclusion vécues et aussi révéler de nouveaux questionnements qui alimentent nos recherches." - Lire la suite
Débat - Émotions et intervention sociale : naviguer entre valeurs, éthique et techno-bureaucratie
"En travail social, les émotions ont une place dans la profession : elles sont encadrées pour limiter leurs manifestations dans la relation entre le professionnel et le bénéficiaire. Or, les émotions ont tendance à disparaître dans la manifestation scientifique (recherche) ou politique (analyse des politiques sociales) de cette discipline. Avec la rationalité gestionnaire et les nouvelles pratiques de management (Bellot, Bresson et Jetté, 2013), les émotions n’ont de toute façon que très peu de place dans les prises de décisions qui se veulent objectives, neutres et égalitaires envers toutes les personnes bénéficiaires. Notre article soulève diverses questions : comment la capacité d’agir des intervenants sociaux est-elle influencée par la difficulté de la prise en compte des émotions? Sommes-nous face à un possible changement de paradigme où la techno-bureaucratie, comme champ d’application des décisions politiques, est arrivée à l’une de ses limites dans le champ de l’intervention sociale? À partir d’exemples de pratiques de trois enquêtes menées par les autrices où la question des émotions s’est avérée centrale dans les interventions, mais n’a pu être prise en compte, nous verrons comment les émotions dans les interventions sociales se butent aux normes professionnelles et managériales." - Lire la suite
Revue Intervention
Consulter l'ensemble des articles de la revue : Numéro 151